Aller Mal, Ça Peut Servir.

par | 1 Mai 2020

Aller-Mal

Étrange, un psy qui fait de la pub pour aller mal ?

Je me suis souvent dit que le métier d’aider les gens, d’être psy, c’est les aider à aller mal.

Aller bien, en général, les gens se débrouillent, le font assez naturellement, disent oui, surfent sur la belle vague.

Aller mal ? Ils freinent, se révoltent, mentalisent, ça prend davantage de temps, ça dure, ça se complique même. Parfois un vrai fromage.

La naïveté, une pathologie comme les autres, nous fait beaucoup de tort. Elle nous fait rêver d’un monde idéal qui n’existe pas, où tout serait positif. Notre naïveté prépare le lit de la surprise, de la déception, de la souffrance et d’une résistance puérile.

Si votre vie ressemble à la mienne, alors oui, il y a aussi des moments difficiles, confrontant, douloureux. L’adulte en nous est invité à s’en occuper. Et si nécessaire, d’ailleurs, avec l’aide éventuelle d’un professionnel.

 

Cette période de confinement et le virus qui rôde invisible dans les parages sont des facteurs de stress, de souffrance et nous confrontent radicalement à notre mode de vie.

J’ai réfléchi (et résisté) à écrire un blog sur le Temps, à publier des post Facebook pour aider les gens en souffrance. J’ai aperçu une ribambelle de mes collègues qui avaient eu la même idée et qui l’ont fait. Tous ces bons conseils, ces interviews éclairées, ces spécialistes qui sont actifs à aider les autres, à les guider, à les inspirer à aller mieux, à aller bien.

 

J’en ai eu la nausée… Pourquoi ?

 

D’abord, je fais confiance aux gens pour vivre cette période courageusement, y faire face, et caramba, vous avez le droit d’aller mal.

Se sentir mal est une réponse adéquate à notre vécu et, ce n’est pas forcément dramatique ou terminal ! Cela fait juste quelques millions de fois que nous avons déjà traversé ce corridor, au cours de notre vie. Et chaque fois, nous passons à autre chose.

Dans la panique et le mal-être, avoués ou non, notre réflexe est souvent de de nous agiter, de faire quelque chose, de retrouver un peu de contrôle. Calmer notre angoisse en nous activant, en remuant les choses et nos proches, ça soulage mais qu’un petit peu.

Dans le couple, lorsque l’autre va mal, nous avons souvent besoin de faire quelque chose mais, surtout, que l’autre fasse quelque chose ! Faire, que faire, « je sais quoi faire pour que tu puisses arrêter d’aller mal, et que moi, je puisse aller mieux » !? Dans mes 20 ans, une amie me criait dessus en me disant : “Laisse-moi aller mal, laisse-moi flipper, bon Dieu, je VEUX aller mal“.

Ceci, parce que je lui mettais la pression involontairement, pour qu’elle aille mieux – vite.

 

Aller mal, traverser cette période honnêtement, humblement, ne pas trop en faire semble permettre des découvertes sensibles et étonnantes, de prendre des leçons. Des prises de conscience aussi. Certains de mes voisins, de mes amis, de mes clients m’ont raconté que cette période leur a ouvert les yeux,  ils ont pris des décisions pour changer certaines choses désuètes ou en relation avec le changement climatique. De belles histoires solidaires, où le cœur prend une belle place.

 

Jean-Paul Sartre a eu dit cette petite phrase qui a fait depuis, un beau chemin : “Nous ne pouvons pas choisir ce qui nous arrive, par contre nous pouvons choisir ce que nous en faisons“.

 

Qu’allons-nous faire de ce moment historique ?

Cherchons-nous à retrouver ce qu’il y avait avant ?

Sommes-nous prêts à rebondir de manière créative à cette désorganisation de nos vies mécaniques ?

 

Et si c’est trop dur, au lieu de chercher trop d’informations et de conseils, je vous souhaite d’être pris dans les bras. Et si vous êtes seul-e, c’est le moment d’être solidaire et de se rapprocher des humains (même virtuellement).

Ensemble c’est plus facile.

 

L'auteur touchant le fond

L’auteur touchant le fond

 

 

 

 

 

5 Commentaires

  1. Carole Pasquier

    Bonjour Stephen,
    J’ai bien aimé ton article qui donne une autorisation, là où souvent, en effet, on ne se la donne pas.
    Avec mes meilleures pensées
    Carole

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  2. André

    Hello Stephen,
    J’apprécie le ton de légèreté et qui me semble également bien objectif, en ces temps troubles et ponctués d’injonctions positives (comme le dit Nadia), ça fait du bien de recadrer les choses et de prendre un peu de recul, histoire d’astiquer un peu ma conscience, de netoyer mes croyances et mes peurs…
    Bises
    André

    Réponse
  3. Olivier Wilhem

    La photo est bonne, cher Stephen.

    Il me semble que vous avez, sur ces blogs un certain potentiel, mais comme dit l’adage,
    « on ne fait pas boire une âne qui n’a pas soif »

    Bon, on dira que l’âne c’est moi, je veux bien être celui de la crèche, si soigné par votre Mona Lisa, qu’elle est jolie 🙂

    Réponse
  4. Brigitte Guichard de Raemy

    Merci Stéphane pour ce message qui me parle beaucoup. En effet une période pour avoir des questions plutôt que des réponses. Et les laisser faire leur chemin en nous.

    Réponse
  5. Nadia

    Merci l’ami!
    Éclairant, ça me parle beaucoup en cette période d’injonctions bienveillantes : « prenez soin de vous et de vos proches.  »
    – Ouais je sais, je fais ce que je peux ! 
    Je le disais à mes patientes (c’est ok d’aller mal). Mais difficile encore de ne pas me débattre quand c’est moi…. (tiens tiens🤪)

    Réponse

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